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la Nanopage

Un grand écran enroulable et tactile

François Poncelet président du Sénat me remet le 1er prix. J’avais mis ma plus belle chemise. Le lendemain les sénateurs portaient la même…

En l’an 2000, j’avais imaginé un écran enroulable aussi grand que des plans d’architecte, que je pourrai dérouler pendant les réunions de chantier. La lecture d’un « Que sais-je » m’apprend globalement comment fonctionne un écran. Il y a des pixels adressés, des émetteurs d’électrons et des photophores. Mais un écran aussi mince et souple doit être composé d’éléments minces et souples. De clic en clic, l’internet m’emporte jusqu’aux nanoparticules. Là, on parle de matériaux stupéfiants, de nanofil de carbone ultra-conducteur et de nanotube formé d’une résille d’atomes de carbone. J’ai imaginé un écran en tissu de nanofil avec des pixels en nanotube. Et déposé un brevet. En l’an 2000, le Sénat m’a remis le 1er prix du Tremplin-Entreprise pour cette invention.

Interview EUROPE.1 par Jacques Pradel

Lumière et nanofrage

L’aide d’OSÉO a subventionné l’étude de marché par ERNST & YOUNG. Cet écran enroulable représente un marché considérable. Une première levée de fonds permet de réaliser le prototype d’un pixel dans le laboratoire de nanotechnologie du professeur Binh VU THIEN au CNRS de Lyon. Les électrons des nano-émetteurs jaillissent jusqu’au photophore. Fiat lux ! Ce microtube-cathodique à émission froide est une performance internationale.
Ensuite, malgré une couverture médiatique étendue, impossible de lever des fonds pour développer le prototype d’un écran d’une centaine de pixels. Les investisseurs trouvent la rentabilité trop lointaine. Les industriels ne financent pas le prototype et conseillent de s’adresser aux banques. Les banquiers ne s’engagent pas sans le prototype d’un industriel… On tourne en rond trop longtemps, les réserves s’épuisent. Et quand l’Union européenne nous accorde enfin une subvention de 2,2 millions pour le projet NANOPAGE-PCRD6, avec un consortium de grands laboratoires européens, CNRS, LETI-CEA, FRAUNHOFER, IMEC, il aurait fallu avoir des fonds propres aussi élevés pour en bénéficier, ce qui bien évidement ne peut être le cas d’une startup à son commencement ! Or là, on n’avait plus un rond. Le renouvellement des brevets n’a pu se faire à temps, on est passé en cessation de paiement —> Nanofrage —> J’ai filé en submersion périscopique loin du funeste attracteur jusqu’aux franges, chez les frangines et les frangins. Vive la Frange !

La modernité est passagère

La modernité est une chrysalide marginale. Elle est en train de se faire. Elle s’expérimente chaque jour, par tâtonnement, par bricolage et par raisonnement, là où les conditions d’existence peuvent évoluer, là où des solutions nouvelles doivent être imaginées. La modernité devient classique quand elle n’innove plus. Elle tombe dans l’obsolescence quand elle n’est plus usuelle. La modernité est passagère.

Actuellement se pose enfin avec acuité le fait que la planète n’est pas extensible, et ses ressources non plus, ce qui donne une limite certaine à l’illusion niaise de la croissance expansionniste. Un modèle pérenne serait cyclique croissant/décroissant/croissant. On a oublié la pulsation régulière des marées, le pouls de son propre cœur. La croissance perpétuelle est une sorte de fantasme priapique. Le modèle est régulé par la loi du Marché où la valeur doit s’accroitre pour en tirer profit. Ce casino global épuise la Terre sans souci du long terme. Ah, le court terme ! Le maximum de gain en un minimum de temps. Ça paraissait normal tant cet objectif était banalisé par les amplificateurs dévoués. Maintenant, la planète est aux mains de robots financiers, les cybertraders spéculent en dépréciant leur proie, des sauterelles mécaniques sur des pays sidérés. L’économie s’inspire de la science dominante, la physique quantique, et s’en justifie. Les valeurs marchent au pas des algorithmes et des probabilités. On calcule le potentiel probable de quantas financiers, de même que le photon est un potentiel probable d’énergie, sans forme ni matière. Pourtant la Nature ne joue pas aux dés…

Alors, on peut se demander ce qui pousse ceux qui, acteurs de l’innovation, la retiennent. Au cours des projets innovants que j’ai tenté de réaliser, j’ai rencontré le plus souvent, à de rares exceptions que je salue ici, des technocrates niais et incultes, des financiers conformistes aliénés au farouest financier, certaines officines publiques d’aide à l’innovation dévouées à l’absence de nouveauté, des organismes publics qui ne représentaient qu’eux-mêmes, bref une bande d’opportunistes vieillots, seulement réactifs à ce qui pourrait fragiliser leur tabouret, en rien intéressés par une nouveauté qui ne collerait pas au script du film qu’ils plaquent sur leur comportement, et pensent qu’on pourrait les croire et supporter leur absence complète d’imagination sur le monde en train de se faire autrement que celui où ils s’illusionnent d’exceller. Ceci pour les moins pourris d’entre eux. Les autres ayant parfaitement compris leur intérêt dans un monde qui les domine et le profit qu’ils pourraient en tirer.

       

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